Recours en cas de conditions indignes de détention.
Devant le juge administratif
- Le référé-liberté
En cas de conditions indignes de détention, il est possible de saisir le juge administratif par un référé-liberté. En revanche, le référé étant une procédure d’urgence, la personne détenue devra justifier le caractère urgent de sa demande.
Si le juge administratif reconnaît les conditions indignes, il pourra enjoindre à l’administration d’adopter toutes mesures visant à faire cesser l’atteinte.
Cependant, depuis 2017, la jurisprudence a adopté une vision restrictive du rôle du juge des référés puisque ce dernier peut uniquement enjoindre l’administration d’adopter des mesures permettant d’agir très rapidement sur la situation des personnes et non des « mesures d’ordre structurel reposant sur des choix de politique publique non susceptibles d’être mises en œuvre ». Cela exclut donc l’obligation de réaliser des gros travaux de modernisation par exemple.
Le référé-liberté est une mesure urgente puisque le juge doit statuer dans les 48h, l’avocat est conseillé mais pas obligatoire.
Il est possible de faire un recours contre la décision qui sera rendue, devant le Conseil d’Etat.
- Le recours indemnitaire
Une personne détenue peut obtenir la réparation pécuniaire d’un préjudice qu’elle a subi du fait d’un comportement fautif de l’administration pénitentiaire en saisissant le juge du fond ou le juge des référés en intentant une procédure de référé-provision.
En revanche, l’indemnisation n’est pas toujours très élevée et il existe de grandes disparités entre les tribunaux.
C’est au détenu de démontre le caractère indigne des conditions de sa détention.
Devant le juge judiciaire
Le 30 janvier 2020, La France était condamnée par la Cour Européenne des droits de l’Homme, dans l’arrêt JMB c/ France pour conditions indignes de détention.
Ainsi, le législateur, par la loi du 8 avril 2021 (n° 2021-403), a mis en place un recours devant le juge judiciaire en cas de conditions indignes de détention.
Quel juge judiciaire saisir ?
- Pour les personnes en détention provisoire ou sous écrou extraditionnel
Elles doivent saisir le Juge des libertés et de la détention (JLD) dont elles relèvent.
- Pour les personnes condamnées
Elles doivent saisir le Juge d’application des peines (JAP) du Tribunal judiciaire dans le ressort duquel est situé l’établissement pénitentiaire en question.
Ce qu’il faut prouver
La personne détenue, avec l’aide de son avocat, doit recenser des éléments circonstanciés, personnels et actuels concernant les conditions de détention. Si ces éléments ne sont pas réunis, le juge considérera que la requête est irrecevable.
Pour examiner les conditions de détention, le juge a plusieurs possibilités :
- Se déplacer sur les lieux de détention
- Ordonner une expertise en désignant un expert inscrit sur les listes d’experts judiciaires ou ayant prêté serment
- Désigner un huissier de justice afin de procéder à toute constatation utile, à des photographies, des prises de vues et de son au sein de l’établissement pénitentiaire (dans des conditions respectant les impératifs de sécurité de celui-ci)
- Procéder à l’audition (peut se faire par visioconférence) de codétenus du requérant, de personnels pénitentiaires ou du chef de l’établissement
- Procéder à l’audition du requérant (même s’il n’a pas demandé à être entendu), en présence de son avocat (peut se faire en visioconférence également)
- Consulter tout rapport issu de la visite d’un organisme national ou international indépendant, décrivant les conditions de détention de l’établissement en question
Si le juge constate que les conditions de détention sont indignes, il peut ordonner un transfèrement (ce qui n’améliore pas les conditions indignes de l'établissement concerné). Cependant, il doit veiller à ce que le changement d’établissement n’éloigne pas la personne détenue de sa famille, sinon il pourrait y avoir une violation du droit à une vie privée et familiale.